jeudi 20 octobre 2016

LE BEL ÉTÉ 8




















                                              RENCONTRE 

                  Vint le mois de juin, et, avec lui, la Comédie du Livre de Montpellier où, sollicitée par un ami libraire,  j’acceptai de me rendre.  (La chose est assez rare pour être signalée : estimant ma présence indispensable à mon malade, je refusais tout déplacement depuis fort longtemps).  J’annonçai le scoop  sur mon blog, en précisant : « Ceux qui seraient tentés par un p’tit brin de causette seront les bienvenus ! ». Ainsi eus-je le plaisir de retrouver Rémy G., un copain écrivain qui habitait la région, et que je n’avais plus vu depuis des lustres…

                  Je signais, sagement  assise à mon stand, quand soudain apparut un homme vêtu de noir qui, surgissant d’entre les piles de livres, me chuchota gravement :
                  — Je suis Castor Tillon. 
                  Le brouhaha ambiant couvrant sa voix, je lui fis répéter.
                  — Oh ! Castor ! m’écriai-je quand je réalisai.
                 Et, ni une ni deux, je lui sautai au cou.
                 Quelques minutes plus tard, attablés devant un verre, nous faisions plus ample connaissance.
                 Contrairement à ce que laissaient supposer ses  coms rigolards, c’était quelqu’un d’infiniment pudique et réservé. J’appris, ce jour-là qu’il était pastelliste (ce que me confirma, le soir même, son site internet) et adorait les animaux — les insectes en particulier, qu’il photographiait à foison.
                J’appris également — avec une confusion facile à deviner — qu’il vivait en Auvergne.  Six cents bornes pour deux trois dédicaces et dix minutes de conversation, c’était dingue, non ? Ce coup-là, juré-craché, on ne me l’avait encore jamais fait…
                  Durant une bonne partie de la journée, Castor  louvoya de table  en table.  A chacun de ses passages, nous échangions un regard complice, de sorte que vers cinq heures du soir, lorsque je m’inquiétai de mon horaire de retour, il me proposa tout naturellement :
                  — Si ça t’embête de prendre le train, je peux te ramener en voiture.
                  J’eus une seconde d’hésitation — juste une. Après tout, le long trajet qu’il s’était imposé trouverait peut-être sa justification dans cette heure et demie de tête-à-tête routier ? 
                  — On me raccompagne, lançai-je au libraire, ahuri. Garde mon billet, tu te le feras rembourser par la SNCF !                 
                  J’appris, bien plus tard, qu’il s’était inquiété de me voir ainsi partir avec  un inconnu. Il ne fut pas le seul.
                  — Et si ç’avait été un serial killer ? s’effara un de mes potes, auteur de thrillers sanglants, à qui je narrai la chose.
                  Je ne souffrais pas, par chance, de ce genre de parano.
                 Sylvain, non plus. Quand je lui annonçai que je rentrais avec Castor,  il mit un hachis Parmentier au four et prépara la chambre d’amis. L’irruption dans notre vie de ce copain virtuel qui, subitement, ne l’était plus, se fit donc dans la décontraction la plus totale. D’autant que le repas était délicieux.





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